Beatitude
"Chacun est fait pour vivre ce qu'il est"
      Vous voyez, je viens de poser le dernier livre de Banana Yoshimoto que j’avais dans ma bibliothèque, et je me suis dit c’est par ça que tu dois commencer. Et pas parce que je suis dans ma période japonisante. Non. Juste une envie. Une manière de donner le ton...
      J‘ai découvert Banana Yoshimoto avec son premier roman publié en France. Kitchen. En février 94. (Je sais, vous êtes en train de vous dire «Quelle mémoire ce PP !», mais c’est juste que je l’avais acheté à sa sortie... Et que je viens de vérifier la date sur le bouquin...)
      Suite à mon anniversaire, et malgré mes achats de cadeaux, il me restait quelques francs à dépenser. J’étais chez Bell (une librairie à Arras, pour ceux qui ne connaissent pas... ;-) ), et en feuilletant le fanzine promo des éditions Gallimard, je suis tombé sur deux bouquins... que j’ai acheté tous deux ! Et l’un des deux était Kitchen (l’autre était Ma tendre ennemie de Lisa Bresner...)
      Bref, tout ça pour dire que ça s’est plutôt passé sans vraiment y penser.  Une envie.
Banana Yoshimoto
Un couv rigolote. Un thème qui me convient. Un incipit qui me touche ("Je crois que j'aime les cuisines plus que tout autre endroit au monde.") Tout ça transformé plus tard en monomanie (vous me reconnaissez bien là ;-) )

Kitchen
      Ce bouquin, c’est l’histoire d’une jeune fille plutôt paumée, Mikage, qui vient de perdre sa grand mère, qui était sa dernière parente. Un de ses camarades de classe, Yûichi Tanabe, lui propose de venir vivre chez lui, avec sa mère, le temps que tout se tasse et se passe. Peu à peu se crée une véritable famille entre ces trois-là. Mikage, pour s’occuper (no-tion très importante lorsqu’on se     retrouve     déboussolée,
seule, sans plus rien à quoi s'accrocher...), se met à cuisiner. Parce qu'elle "adore les cuisines". Eriko, la mère de Yûichi, est un personnage à part. Magnifique, drôle, et elle est en fait un transsexuel travaillant dans un bar de nuit. Ce trio se sent bien ensemble. Et là où tout autre mauvais roman aurait pu se faire pesant, lourd de symboliques à deux balles, Kitchen se fait naturel, minimaliste. Nous sommes dans une tranche de quelque chose. Les anglo-phone disent story-telling. On touche à une sorte de vérité sous le quotidien. L’héroïne du bouquin va évoluer, va découvrir ce que tout héros ou héroïne de Banana Yoshimoto finit toujours par découvrir : que la vie est belle, et que ce sont les points sombres qui sont dedans qui nous le révèle, paradoxalement.
      Tout comme dans la nouvelle qui suit le roman (dans l'édition française au moins) (je ne sais rien des autres éditions). "Moonlight shadow". L’histoire, triste, à la limite du fantastique, de trois personnes ne sachant faire le deuil (littéralement, hélas) de leur amour.  Qui, soudain,  par
l’histoire étrange qu’ils vont vivre, vont pouvoir intégrer la mort et continuer dans le grand flot de la vie.

Un amer breuvage
      C'est ce qui caractérise en premier les textes de Banana Yoshimoto. Ce sens du désespoir. Ca me fait, moi, penser à un philosophe que j'aime beaucoup (que voulez-vous, on ne se refait pas !...) Sören Kierkegaard. Un Da-nois. Très peu de chance donc qu'il ait quoi que ce soit à voir avec l’écriture de notre Japo-naise. Mais quand même.
      Pour lui (de qui je tiens ma tendance individueliste) (et existentielliste) (en gros, l'idée selon laquelle l'important, en philosophie, et dans la vie, c'est la notion d'individu, d'être particulier que nous sommes tous, avant même d'être des animaux politi-ques), l'éveil à la philosophie (et donc à la vie...) se fait avec le désespoir. On est là, tran-quillement, à se laisser porter par le "rien d'important", et paf, soudain, on en a marre. Fondamentalement marre. Ou plutôt, quelque chose ne va plus. "La vie m'est devenue un
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